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Lipo et Daniel.

Lipo avait décidé qu’il n’y aurait ni commencement, ni fin; ni bonjour, ni au revoir. Lipo avait décidé que la loi serait celle de la nature; que chaque rencontre ne serait que dans la continuité de nos vies respectives. Elle ne dormait pas non plus et se couchait tôt ou tard pour se distraire, pour se laisser rêver. Lipo avait décidé que l’absence de repères serait sa sécurité; que chaque homme qu’elle rencontrerait ne serait qu’un trait de l’humanité parmi ses milliards; tous ces hommes seraient l’Homme. Tous ces matins ne seraient que la rotation de la Terre autour du Soleil sans prendre en compte d’un emploi du temps établi. Lipo était belle et n’avait pas besoin de faire attention à quoi que ce soit; tout un chacun s’occupait d’elle, tout un chacun la désirait dans sa vie. Elle pouvait se foutre de tout et se laisser tomber, on la rattrapait toujours. Peut-être tombait elle un peu plus chaque fois dans l’incompréhension, sans appréhension de cet apprentissage sur le fil ; beauté libre et solaire.

Daniel avait décidé que chaque chose aurait un commencement, une fin. Le tout ressortant dans une symbolique qui lui était chère. Daniel avait décidé que sa loi serait celle de l’Homme, que chaque rencontre aurait un lien logique avec la précédente et la suivante. Il suivait avec discipline un emploi du temps millimétré pour pouvoir, parfois, se laisser rêver. Daniel avait décidé que tous ses repères lui permettraient d’imaginer que sa relation lipocéenne serait une multitude de traits de la femme parmi ses milliards; toutes ses facettes, une fois rencontrées, seraient la Femme. Tous ces matins seraient une nouvelle naissance posée et liée à ses antécédences, imbriquée sans hasard comme une évidence. Daniel était un élément du néant et avait besoin de désirer exister pour se perpétuer; tout un chacun vivait dans sa propre sphère, attaché à ses règles d’une manière sectaire. Il avait peur de tout et se construisait des mythes pour tenir le coup; penseur abstrait émérite et rêveur.

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